07/04/2021
LETTRE OUVERTE à BENJAMIN STORA,
Monsieur
J’ai lu attentivement votre rapport, et j’avoue que j’avais un parti plutôt favorable et bienveillant à votre égard. Je rappelle que vous avez bercé ma vie et éveillé ma conscience par votre érudition sur la guerre d’Algérie. Vous avez été rare et unique dans l ‘ensemble de vos écrits. Guerre qui comme vous, moi, fils du sous-préfet d’Akbou a hanté mes nuits et mes cauchemars.
Mais Monsieur Stora, m’est apparu dans votre rapport quelque chose qui n’a plus rien à voir avec vos écrits antérieurs et ce regard de Camus dont vous vous targuez. Il est une autre époque moins risquée. Un silence m’est paru odieux, celui à propos du peuple algérien dans son entier, c’est-à-dire des vrais combattants de la libération nationale algérienne (pas ceux qui de l’extérieur à qui on a donné le pouvoir et l’ont volé) et ceux qu’on nomme harkis, (Civils, Elus et supplétifs de l’armée française) qui loin d’avoir fait le choix de l’Algérie française avait fait le choix d’une autre route pour l’Algérie. Je ne prendrais pas tous les détails, où vous avez péché par omission volontaire. Je sais qu’il est difficile d’être historien et le conseiller du Prince, ou plutôt des deux princes d’États complices. Je sais encore qu’il est difficile de s’extraire de sa condition première d’ex européen ou « pied noir », ou d’une communauté qui n’a pas facilité « l’Algérie algérienne en liaison avec la France. »
D’où je vous parle ? De la vallée de la Soumman ou plus précisément de l’arrondissement d’Akbou, départ du célèbre Congrès de 1956 du FLN et arrondissement pilote du plan Constantine, que je connais bien.
Mon père, Sous-préfet de 1959 à 1962, partisan de l’Algérie algérienne, a dénoncé les tortures jusqu’à assigner des militaires au tribunal militaire de Sétif. (60 morts par mois de mort sous la torture dans cet arrondissement de 105 000 habitants qui avait un DOP, un centre de torture), qui s’est rebellé auprès du commandant Florentin et du Général Parlanges sur les 25 000 personnes réfugiées et regroupées dans des conditions impardonnables, « concentrationnaires » ou chaque jour mourraient de faim et de froid des enfants.
Les massacres du peuple algérien ce sont dans cet arrondissement près de 8 000 morts et 6667 maisons détruites. Les morts, on n ‘est jamais sûr, les maisons détruites, et celles des villages de Ouzelaguen , il a pu les compter.
Pas besoin de revenir sur la minime minimorum préconisation vis-à-vis des harkis, ni par exemple sur l’oubli que parmi les marcheurs de 83 qui ont fondé SOS Racisme, où il y avait des enfants d’harkis et d’immigrés, ni d’autres oublis ou silences révélateurs de votre cécité gravissime, que je pressentais dans vos écrits antérieurs : Celle de la communauté harki (Prés de 1000 morts dans l’arrondissement d’Akbou de 62 à 63, avec des massacres dans 3 camps) est étrangement en blanc dans votre rapport.
Et c’est là qu’est le vrai problème de fond. Vous écrivez :
« Tout groupe appartenant à cette histoire est spécifique, mais aucun n’est exceptionnel et nul ne doit être placé au-dessus des autres. Or, chaque groupe exige une empathie à sens unique, unilatérale, exclusive. »
Tout est dit et tout est faux ! Il n’y a d’abord, dans votre rapport, aucune empathie à sens unilatérale, exclusive ni pour le peuple algérien ni pour la communauté harkie. Je sais, il faut être diplomate et ne vexer ni le gouvernement algérien, ni le gouvernement français ! Si vos mots vous trahissent souvent, il y a peu d’empathie ni pour le peuple algérien, ni pour la communauté harkie.
Mais pire vous refusez la hiérarchisation des groupes et des communautés. Ce n’est pas seulement dommage, c’est un tort. J’ose dire que, c’est une escroquerie. Dans votre rapport comme dans notre société plus personne n’est responsable et surtout pas ceux qui en portent les avantages et les honneurs.
Je ne vais pas refaire l’histoire, vous êtes meilleur que moi.
Mais qui est d’abord responsable de cette horrible et unique histoire coloniale de la France en Algérie? Et ne doit-on pas hiérarchiser les responsabilités plutôt que de faire de la psychologie de bas étage ou empathique ?
En premier lieu, la France et ses divers gouvernements, son armée, Bugeaud et les autres, sont les premiers responsables de cette guerre de conquête et d’exploitation coloniale de 132 ans. Et n’oublions pas à l’heure où nous commémorons la commune de Paris, les massacres de l ‘insurrection algérienne, de Mokrani et du Cheik El Haddad, dont les fils ont rejoint les communards en Nouvelle Calédonie, répétition générale de le guerre de libération de 54, après le ratage massacre de 1945 à Sétif. Ce silence de la III ème République, fondé sur les massacres de la commune de Paris et des trois départements français d’Algérie, dit bien notre mensonge.
Les européens et pieds noirs qui même pauvres, qui par la volonté de cette République ont spolié le peuple algérien (séquestres) n’ont pas connu la misère, les massacres (ou si moindre) ni les camps de regroupement, sont les seconds responsables. Ils se sont arc-boutés derrière leur « race » et leurs privilèges, refusant les offres d’ouverture de Messali Hadj ou Ferhat Abbas. Mon père écrivait avec ironie à Michel Poniatowski, en 1962, en constatant qu’en 3 ans, il avait plus investi qu’en 132 ans, « que le colonialisme n’a rien fait, l’indépendance réalise »
Seul le peuple « indigène », algérien peut connaître le statut de victime. Un peuple qui ne formait certes pas un Etat au sens où nous l’entendions, mais qui avait une culture, une histoire, un mode de vie qui valait autant si c’est mieux que le nôtre. L’Émir Abdelkader, que vous honorez, en est la preuve incarnée.
Et dans ce peuple qui avait-t-il ? Une grande majorité de fellahs, de paysans, humiliés, outragés, enchaînés qui en 1954 n’ont pas eu d’autre choix que de prendre les armes.
Je ne rentrerais pas dans cette guerre fratricide, et civile que nous avons utilisé, entre FLN et MNA, entre Harkis et Fellagas, entre militants de l’intérieur et armée de l’extérieur, de ce peuple divisé à souhait et de la responsabilité des dirigeants du FLN qui ont oublié, abandonné leur méritoire congrès de la Soummam, ou les accords d’Evian ; Je ne reviendrais pas sur cette guerre la plus cruelle et la plus barbare que nous avons commise.
Au risque de me répéter, vous écrivez bien : « Tout groupe appartenant à cette histoire est spécifique, mais aucun n’est exceptionnel et nul ne doit être placé au-dessus des autres. »
Et bien non, monsieur le conseiller des princes, le peuple algérien est au-dessus de tout dans cette histoire. Et je dis bien le peuple, le peuple qui s’est battu pour son indépendance... et il était plus nombreux que l’on croit à vouloir une forme d’indépendance et de liberté, après les refus multiples des gouvernements de la France et des européens d’Algérie. Ferrat d’Abbas, le modéré, raconte bien son entrevue avec le Marechal juin en Aout 54 en concluant : « Si je comprends bien, nous n’avons qu’un seul choix, celui de quitter l’Algérie ou de prendre les armes. »
Et dans ce peuple algérien, il y avait ceux qu’on appelle aujourd’hui communément les harkis. Ils étaient des civils, ils étaient des élus, ils étaient militaires, ils étaient disait-on, supplétifs, Goumiers, GMS, Moghaznis, harkis. Ils voulaient eux aussi, pour le plus grand nombre, l’Algérie algérienne, mais peut-être pas celle du FLN, même si ils les admiraient, doutaient et n’aimaient pas le chemin de leurs frères partis au maquis. Ils se croyaient français puisqu’ils l’étaient depuis 1830, dans les 3 départements français, de Constantine, Alger et Oran. Je me souviens du nom des 240 kabyles du monument aux morts d’Akbou, de ces morts pour la France de 14/ 18, de 39/45 où j’avais été frappé, enfant, par le fait qu’il n’y avait aucun nom européen. Les patronymes européens sont arrivés après, en 1954. Etrange non ?
Oui monsieur le conseiller, tout groupe appartenant à cette histoire est spécifique, mais contrairement à vous je pense que quelques-uns sont exceptionnels et que deux groupes doivent être placés au-dessus du lot et je sais que je vais choquer les princes que vous conseillez, ceux de là-bas et ceux d’ici comme certains de mes amis : le vrais Moudjahidin et les harkis sincères. Le mouvement initié par les jeunes en février 2019, Hirak, anagramme de Harki, est là pour le confirmer. Une amie autrefois proche du mythe du FLN m’a dit le 8 mars 2019, à Alger : « Hugues, avant je n’entendais pas ce que tu me disais, maintenant j’irai cracher sur la tombe de Bouteflika ». Alors qu’elle me disait cela, Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à ce harki qui militant FLN apportait de l’argent au Maroc mais écœuré de voir l’opulence d’un côté et la misère de l’autre, finit par rejoindre le camp français. Oui je laisse à l’Algérie et aux algériens le soin d’honorer leurs vrais héros et non les usurpateurs qui venant de l’armée de l’extérieur ont été mis par l’État Français pour mieux gérer leur affaires communes. Je ne peux ne pas penser à ce directeur du centre social d’Akbou, proche de Germaine Tillion, qui de 67 à 70 a instruit à Siddi bel abbés la gendarmerie algérienne, alors que des innocents harkis croupissaient encore dans les geôles de Boumediene.
Et je demande au pouvoir français pas seulement de demander pardon mais de réparer l’infamie qu’il a commis contre les harkis, en Algérie comme n France. Ils sont du peuple algérien et ont choisi par obligation, par dépit, par ignorance, par volonté ou par désir, un autre chemin.
Je ne peux pas non plus ne pas penser à ce harki qui a dénoncé, en décembre 59, un officier pour fait de tortures et assassinat sur 3 moudjahidines et que mon père a fait traduire devant un tribunal militaire.
Je ne peux pas ne pas penser à ce harki qui est venu dire à mon père, en avril 60, ce qui se passait dans le camp de regroupement d’Azib Ben Ali Cherif ou chaque jour mourrait de faim et de froid un enfant de l’Algérie encore française.
Je ne peux ne pas penser à ces harkis qui ont voulu en juillet 62 rester dans leur pays pour aider à la reconstruction, et qui ont été emprisonnés, humiliés et massacrés, alors que le député FLN n’avait été qu’un Marsien.
Je ne peux pas oublier le sous-préfet FLN Semahdi, successeur de mon père, qui a aidé et soutenu les familles de harkis en protégeant leur père, et en fournissant des papiers. Il a fini en prison.
Je ne peux pas oublier ce militant Pro FLN qui de 62 à 66, a aidé, exfiltré des harkis, soulagé des familles en leur fournissant vivres et argent.
Bien entendu, ici et là, il y a eu des salauds. Mais l’amnistie comme vous le dites monsieur Stora a servi l’amnésie. Et la responsabilité, comme disait mon père, c’est d’abord celle des gouvernants, puis des officiers supérieurs et en fin des grands colons. Et c’est ceux-là, qu’ils auraient fallu traduire devant les tribunaux, pour l’exemple, pour montrer que les crimes contre l’humanité ne doivent pas rester impunis. Faire un procès pour l’histoire, comme après la II ème guerre mondiale et des crimes nazis et ne pas confondre responsables et lampistes.
Que l’Algérie s’occupe de ses bandits, de ses égorgeurs, de ses profiteurs, de ses usurpateurs…
Et que nous expions, nous, notre dette vis à vis des harkis, cet autre peuple de l’Algérie, qui comme disait Clemenceau à propos des poilus ; «ont des droits sur nous ».
Oui rien sur notre infamie à l’égard des harkis, que nous n’avons pas voulu armer, dès 1954, de peur qu’ils retournent leurs armes contre les pieds noirs et l’armée française…
Oui ! Rien sur le fait que nous les avons désarmés en 62, abandonnés, livrés aux répugnances, et aux massacres de l’Armée National Populaire et des marsiens.
Oui ! Rien sur le fait que nous les avons cachés, parqués, humiliés, détruits dans nos camps et hameaux forestiers en France, dans notre manque d’accueil où ils ne furent jamais rapatriés mais toujours réfugiés et niés.
Notre honte, notre déshonneur est là, et je suis de ceux qui pense que les harkis sont l’alpha et l’oméga de notre guerre coloniale, qu’ils sont le problème des deux États, mais la solution des deux peuples, car ils sont plus qu’un symbole, ils sont la grimace de notre guerre atroce, et le sourire de notre réconciliation possible.
Alors Monsieur Stora, il ne sert à rien de les cacher et de les taire. Les harkis sont la mauvaise conscience des deux États « traitres » à leur peuple.
Et s’ils symbolisent, pour les ignorants, la traîtrise, les vrais traîtres aux harkis et à l’hirak, aux peuples en mouvement seront toujours, dans cette guerre de 132 ans, d’abord l’État Français et ensuite l’Etat algérien et leurs suppôts.
Pour conclure je vous livre ces mots qui répondent superbement à votre oubli. Ce sont ceux d’une amie pour l’éternité, Farida, fille de harki :
« Je n’étais qu’une enfant héritière de l’histoire de nos pères.
J’emportais avec moi pour ce voyage sans retour quelques souvenirs, gardés secrètement au fond de mon âme malade.
Sans rejet, sans joie, sans sérénité.
J’habite l’inconfort d’une haute solitude.
Je suis la page d’un livre qui ne s’écrit pas, mémoire d’une guerre sordide et fratricide ; invisible dépossédée, punie injustement.
Je suis l’enfant de deux États chers à mon cœur.
J’ai soif d’exister et défaire les liens du passé, être enfin à ma place. » Farida.
Il serait temps de regarder toutes les réalités et pour nous français, celle des harkis en premier, qui disent encore et toujours notre racisme colonial, qui a commencé en Algérie en 1830, et de criminel façon !
En France, c’est à eux que nous devons le dernier mot, ils ont des droits sur nous !
Hugues Robert,
04/04/2021
L’homme le plus puissant d’Algérie n’est pas le président Abdelmejid Tebboune, bien mal élu en décembre 2019, dans un scrutin marqué par une abstention historique de 60%. Le véritable « homme fort » du pays demeure son chef d’état-major en tant que dirigeant de fait des « décideurs » militaires qui, sous une forme ou sous une autre, accaparent le pouvoir depuis des décennies. En ce même mois de décembre 2019 où Tebboune accède à la Mouradia, l’équivalent algérien de l’Elysée, Chengriha succède à la tête des armées algériennes à Ahmed Gaïd Salah, décédé « des suites d’un arrêt cardiaque à son domicile », selon le communiqué officiel. Gaïd Salah avait contraint le président Bouteflika à la démission en avril 2019, dans l’espoir d’apaiser la contestation pacifiste du Hirak, avant de pousser la candidature Tebboune pour en finir une fois pour toutes avec la protestation populaire.
UN PRESIDENT SOUS TUTELLE
La discrétion ostensible de Chengriha tranche avec les interventions brutales et les discours volontiers menaçants de Gaïd Salah, à qui les « décideurs » ont reproché d’avoir exposé inutilement l’institution militaire. Le nouveau chef d’état-major se veut avant tout le garant d’une réconciliation interne à la clique dirigeante, avec l’acquittement en janvier dernier des anciens chefs des renseignements militaires, les généraux Mediene et Tartag, condamnés à 15 ans de prison après la démission de Bouteflika. Mais Chengriha n’hésite pas à brider le président Tebboune qui, après avoir annoncé un remaniement gouvernemental, le 19 février, ne parvient à changer ni le Premier ministre, ni les titulaires des portefeuilles régaliens. Le chef d’état-major n’est pas non plus favorable à un authentique travail de mémoire sur la « guerre de libération » anti-coloniale, qui remettrait en cause la propagande officielle, fondamentale pour la légitimation des généraux algériens.
L’Armée nationale populaire (ANP) se pose en effet en héritière de l’Armée de libération nationale (ALN), le bras armé du Front de libération nationale (FLN) depuis le début, en 1954, de l’insurrection anti-française. Cette ANP émane pourtant d’une seule partie de l’ALN, « l’armée des frontières », qui fit mouvement à partir du Maroc et de la Tunisie, lors de l’indépendance de 1962, pour étouffer la résistance intérieure des maquis de l’ALN. Une telle militarisation du régime algérien renversa la hiérarchie traditionnelle des pouvoirs en faisant du FLN, parti unique jusqu’en 1989, le bras civil de l’ANP. C’est pourquoi l’exigence d’un gouvernement pleinement civil, enfin émancipé de la tutelle militaire, est au coeur des revendications du Hirak, dont les manifestations ont repris depuis plus d’un mois. C’est également pourquoi Chengriha s’efforce de caricaturer la contestation populaire en « complot de l’étranger », dont la France serait l’inspiratrice. Il a beau être le premier chef d’état-major sans aucun passé anti-colonial, il choisit ainsi de relancer la guerre des mémoires pour conforter un statu quo aussi favorable aux généraux algériens.
LA SURENCHERE DES VICTIMES
Le 17 mars, Chengriha ouvre avec emphase un séminaire intitulé « Mémoire et unité nationale »: « Les positions du peuple algérien sont comme les montagnes, immuables et inébranlables, puisqu’elles s’inspirent de notre doctrine nationale et de notre glorieuse révolution de libération, scellée par le sang de millions de chouhada » (martyrs). L’exaltation de la lutte anti-française comme seule et unique « révolution » est une constante du discours officiel, ne serait-ce que pour disqualifier toute forme de contestation radicale. L’invocation de « millions » de martyrs est plus troublante dans un pays où, jusque là, était plutôt avancé le chiffre d’un million, voire d’un million et demi de morts (les historiens français considèrent quant à eux que le nombre d’Algériens tués de 1954 à 1962 est de l’ordre du quart de million, dont environ un cinquième par le FLN). Une telle inflation victimaire a été encouragée par la polémique entre la France et la Turquie sur le génocide arménien, le président Erdogan ayant révélé que, selon Tebboune, « la France a massacré plus de cinq millions d’Algériens » en 132 ans d’occupation.
Le discours du 17 mars de Chengriha est d’autant plus combatif qu’il appelle à « préserver le citoyen des dérives alternatives influencées par différents canaux médiatiques ». Là aussi, c’est la France qui est dénoncée pour l’écho qu’elle accorderait aux revendications et aux manifestations du Hirak. Le chef d’état-major balaie les gestes déjà accomplis par Emmanuel Macron en vue d’une réconciliation des mémoires entre la France et l’Algérie, qu’il s’agisse du rapport de l’historien Benjamin Stora, de l’ouverture relative des archives publiques ou de la reconnaissance de la responsabilité de l’armée dans la mort d’Ali Boumendjel. Tebboune, malgré les échanges directs qu’il a eus avec son homologue français à ce sujet, est contraint de s’aligner, le 22 mars, par la voix d’Abdelmajid Chikhi, son « conseiller pour la mémoire nationale », directeur des archives: le rapport Stora ne serait qu’un « rapport franco-français » et « officiellement, c’est comme si ce rapport n’existait pas ». Un tel verrouillage au sommet indigne les historiens algériens qui, le 25 mars, demandent publiquement à Tebboune un accès enfin libéré aux archives nationales.
Il est malheureusement à craindre que les généraux algériens continuent de promouvoir leur propagande d’auto-justification, au détriment d’un regard apaisé sur l’histoire partagée entre leur pays et la France.
Article de Jean-Pierre Filiu paru dans Le Monde.fr du 4 avril 2021
30/03/2021
A chaque nomination d’un chef de canton, il est indiqué qu’il sera assisté d’un secrétaire et de tel nombre de goumiers. Dans la société traditionnelle tchadienne, beaucoup reconnaissent les goumiers de part leur rôle et leur accoutrement. Mais, c’est quoi être justement « goumier » au Tchad ?
Selon certains documents, le mot goumier vient du terme « goum » qui désigne une compagnie de goumiers. Il provient de l’arabe maghrébin « gūm » et de l’arabe classique « qawm », signifiant « tribu, peuple, gens » qui désigne les contingents de cavaliers armés que certaines tribus fournissent au chef du pays lorsqu’il fait une expédition.
Dans son acceptation francophone la plus utilisée aujourd’hui, le « goumier » (en arabe : « goumi »), membre d’un goum, a un sens très péjoratif issu, cette fois, de la guerre d’Algérie, pendant lesquels les goumiers d’Algérie étaient, comme les harkis, des supplétifs de l’armée française.
Le terme goumier est ainsi élargi à d’autres pays du Sahel et du Sahara notamment, le Tchad dont les Etats précoloniaux ont entretenu des relations avec les pays arabes et l’Empire Ottoman. Comme écrivait cet auteur « au Sahel et au Sahara, les troupes coloniales françaises appellent goumiers les méharistes nomades, par opposition aux tirailleurs « sédentaires ». Les goumiers servent ensuite aux côtés des gardes-cercles et gardes méharistes, dépendant de l’administration coloniale. Les goumiers sont jusqu’en 1958 sous statut civil bien que servant comme militaires ».
Aux indépendances africaines, les goumiers rejoignent les gardes nationales de leur nouvel Etat. C’est le cas au Tchad où des goumiers ont été les premiers à former la Garde Nationale et Nomade du Tchad (GNNT). Une autre partie est restée dans la sécurité des autorités traditionnelles et coutumières dont le premier texte les régissant après l’indépendance, est l’ordonnance n°4/INT du 13 février 1960 portant organisation administrative générale du territoire du Tchad, mais surtout le décret n°102/PR/INT du 6 mai 1970 portant statut de la chefferie dont l’article premier mentionne que les chefs traditionnels sont les sultans, les chefs de canton et les chefs de groupement de villages et les chefs de village.
Avec la naissance de l’armée tchadienne, les goumiers sont désormais « agents de sécurité » auprès des sultans, chefs de canton, de tribus et groupements. Leur nombre, auprès de chacune de ces entités traditionnelles, est fixé par le décret n°629/PR/RM/MATGL/2016 du 15 septembre 2016, qui a modifié d’autres actes un peu anciens. Nous nous servons de ce décret car, c’est lui qui est en vigueur actuellement.
De ce fait, « le nombre des goumiers et secrétaires des autorités traditionnelles et coutumières est fixé comme suit : sultan : cinq goumiers et un secrétaire ; chef de canton : deux goumiers et un secrétaire ; chef de tribu : deux goumiers et un secrétaire ; chef de groupement : un goumier et un secrétaire ».
Leurs salaires sont pris en compte par le décret n°630/PR/RM/MATGL/2016 du 15 septembre 2016 fixant les rémunérations mensuelles des secrétaires et des goumiers des autorités traditionnelles et coutumières.
L’acte présidentiel précise que « les allocations mensuelles des secrétaires et des goumiers des autorités traditionnelles et coutumières sont exclusives de toutes remises pour les secrétaires 60 000 FCFA et pour les goumiers 60 000 FCFA ». Ces allocations mensuelles des secrétaires et des goumiers des autorités traditionnelles et coutumières sont uniformes et exclusives de toutes remises et ne peuvent être cumulées avec les traitements des fonctionnaires.
Par contre en 1960, le décret n°45/INT du 11 mars 1960 réglementant le mode de recrutement et de rétribution des goumiers des chefferies nomades dans le territoire de la République du Tchad, relève que les goumiers sont recrutés par décision des sous-préfets et leur salaire sera réglé sur état nominatif et certificat de service fait par les sous-préfets qui seront, à cet effet, désignés comme billeteurs.
En 1960, il est précisé que le salaire des goumiers ne saurait être inférieur au salaire minimum interprofessionnel garanti en vigueur dans les sous-préfectures où ils sont en service. Le décret de mars 1960 mentionne que chaque goumier fournira sa monture. En cas de manquement à la discipline, les sous-préfets pourront révoquer les goumiers après un avertissement et un blâme.
28/03/2021
Le ministre de la Santé, Jacques Raynal, était présent, vendredi matin, à la cérémonie organisée à l’occasion de la Journée nationale d’hommage aux Harkis et aux autres membres des formations supplétives de la guerre d’Algérie.
La cérémonie s’est déroulée au Monument aux Morts, à Papeete, en présence également du secrétaire général du Haut-commissariat, Eric Requet, représentant le Haut-commissaire de la République, de la première vice-présidente de l’Assemblée de la Polynésie française, Sylvana Puhetini, de la sénatrice de Polynésie française, Laina Tetuanui, et du président du CESEC, Eugène Sommers.
18/03/2021
Une délégation d’AJIR pour les Harkis s’est rendue ce 18 mars à Evian.
Objectifs : d’une part rappeler que les accords signés le 18 mars 1962 par la France et le FLN n’ont pas été respectés avec les conséquences dramatiques que l’on sait. D’autre part honorer la mémoire des victimes d’après le 19 mars notamment celles qui n’ont pas été rapatriées en métropole !
Initialement, une gerbe devait être déposée devant l’hôtel où furent finalisés et signés les accords (transformé en résidence privée). Mais il n’y a pas de plaque rappelant cet événement historique, comme si au fond il n’y avait pas de quoi être fier de ces accords et donc de les rappeler. D’ailleurs, rien dans la ville, ni rue, ni place, ni même impasse, ne se nomme Accords d’Evian !
Le dépôt de gerbe a donc eu lieu devant le beau Monument aux Rapatriés. Ce monument érigé en 1922 n’était pas pour les rapatriés d’Algérie mais ceux fuyant les territoires occupés. Qu’importe. Comme l’a rappelé le Président national, tous les Rapatriés ont en commun la violence de l’arrachement à leur terre natale et souvent des êtres chers laissés là-bas.
En raison de la Covid, la délégation était volontairement réduite à 6 personnes dont 2 portes drapeaux, tous de la région Rhône Alpes Auvergne, la plus proche d’Evian.
Madame le Maire d’Evian a ensuite reçu très chaleureusement la délégation à l’Hôtel de Ville.
AJIR : Association Justice Information Réparation, pour les Harkis. Contact : ajirfrancecontact@gmail.com Association loi 1901 - tout don à l'association est éligible aux réductions d'impôts